Chapitres
Tibule – Livre 1 – Elégie 2
Version originale latine
Adde merum vinoque novos conpesce dolores,
Occupet ut fessi lumina victa sopor,
Neu quisquam multo percussum tempora baccho
Excitet, infelix dum requiescit amor.
Nam posita est nostrae custodia saeva puellae, 5
Clauditur et dura ianua firma sera.
Ianua difficilis domini, te verberet imber,
Te Iovis imperio fulmina missa petant.
Ianua, iam pateas uni mihi, victa querelis,
Neu furtim verso cardine aperta sones. 10
Et mala siqua tibi dixit dementia nostra,
Ignoscas: capiti sint precor illa meo.
Te meminisse decet, quae plurima voce peregi
Supplice, cum posti florida serta darem.
Tu quoque ne timide custodes, Delia, falle, 15
Audendum est: fortes adiuvat ipsa Venus.
Illa favet, seu quis iuvenis nova limina temptat,
Seu reserat fixo dente puella fores;
Illa docet molli furtim derepere lecto,
Illa pedem nullo ponere posse sono, 20
Illa viro coram nutus conferre loquaces
Blandaque conpositis abdere verba notis.
Nec docet hoc omnes, sed quos nec inertia tardat
Nec vetat obscura surgere nocte timor.
En ego cum tenebris tota vagor anxius urbe, 25
Nec sinit occurrat quisquam, qui corpora ferro
Volneret aut rapta praemia veste petat.
Quisquis amore tenetur, eat tutusque sacerque
Qualibet: insidias non timuisse decet. 30
Non mihi pigra nocent hibernae frigora noctis,
Non mihi, cum multa decidit imber aqua.
Non labor hic laedit, reseret modo Delia postes
Et vocet ad digiti me taciturna sonum.
Parcite luminibus, seu vir seu femina fiat 35
Obvia: celari volt sua furta Venus.
Neu strepitu terrete pedum neu quaerite nomen
Neu prope fulgenti lumina ferte face.
Siquis et inprudens adspexerit, occulat ille
Perque deos omnes se meminisse neget: 40
Nam fuerit quicumque loquax, is sanguine natam,
Is Venerem e rapido sentiet esse mari.
Nec tamen huic credet coniunx tuus, ut mihi verax
Pollicita est magico saga ministerio.
Hanc ego de caelo ducentem sidera vidi, 45
Fluminis haec rapidi carmine vertit iter,
Haec cantu finditque solum Manesque sepulcris
Elicit et tepido devocat ossa rogo;
Iam tenet infernas magico stridore catervas,
Iam iubet adspersas lacte referre pedem. 50
Cum libet, haec tristi depellit nubila caelo,
Cum libet, aestivo convocat orbe nives.
Sola tenere malas Medeae dicitur herbas,
Sola feros Hecates perdomuisse canes.
Haec mihi conposuit cantus, quis fallere posses: 55
Ter cane, ter dictis despue carminibus.
Ille nihil poterit de nobis credere cuiquam,
Non sibi, si in molli viderit ipse toro.
Tu tamen abstineas aliis: nam cetera cernet
Omnia, de me uno sentiet ipse nihil. 60
Quid, credam? nempe haec eadem se dixit amores
Cantibus aut herbis solvere posse meos,
Et me lustravit taedis, et nocte serena
Concidit ad magicos hostia pulla deos.
Non ego, totus abesset amor, sed mutuus esset, 65
Orabam, nec te posse carere velim.
Ferreus ille fuit, qui, te cum posset habere,
Maluerit praedas stultus et arma sequi.
Ille licet Cilicum victas agat ante catervas,
Ponat et in capto Martia castra solo, 70
Totus et argento contextus, totus et auro
Insideat celeri conspiciendus equo,
Ipse boves mea si tecum modo Delia possim
Iungere et in solito pascere monte pecus,
Et te, dum liceat, teneris retinere lacertis, 75
Mollis et inculta sit mihi somnus humo.
Quid Tyrio recubare toro sine amore secundo
Prodest, cum fletu nox vigilanda venit?
Nam neque tum plumae nec stragula picta soporem
Nec sonitus placidae ducere posset aquae. 80
Num Veneris magnae violavi numina verbo,
Et mea nunc poenas inpia lingua luit?
Num feror incestus sedes adiisse deorum
Sertaque de sanctis deripuisse focis?
Non ego, si merui, dubitem procumbere templis 85
Et dare sacratis oscula liminibus,
Non ego tellurem genibus perrepere supplex
Et miserum sancto tundere poste caput.
At tu, qui laetus rides mala nostra, caveto
Mox tibi: non uni saeviet usque deus. 90
Vidi ego, qui iuvenum miseros lusisset amores,
Post Veneris vinclis subdere colla senem
Et sibi blanditias tremula conponere voce
Et manibus canas fingere velle comas,
Stare nec ante fores puduit caraeve puellae 95
Ancillam medio detinuisse foro.
Hunc puer, hunc iuvenis turba circumterit arta,
Despuit in molles et sibi quisque sinus.
At mihi parce, Venus: semper tibi dedita servit
Mens mea: quid messes uris acerba tuas?
En quête de cours de latin ?
Version française traduite
Verse encore! dans le vin apaise mes douleurs neuves,
pour que mes yeux vaincus enfin par la fatigue s'abandonnent au sommeil,
et, quand Bacchus aura largement envahi mes tempes, que nul ne me réveille,
dans le repos de mon triste amour!
On monte une garde farouche auprès de notre amie,
et un dur verrou clôt solidement sa porte.
Porte d'un maître peu commode, sois battue par la pluie,
sois frappée par la foudre lancée sur l'ordre de Jupiter!
Porte, allons, ouvre-toi, ouvre-toi pour moi seul et vaincue par mes plaintes, sans faire de bruit, furtive, en tournant sur tes gonds!
Et si, dans ma démence, je t'ai maudite, pardon!
Je souhaite que mes injures me retombent sur la tête.
Il te convient plutôt de penser aux prières sans nombre que je t'ai adressées d'une voix suppliante, en comblant tes soutiens de mes guirlandes de fleurs.
Toi non plus, Délie, n'aie pas peur de tromper tes gardiens:
il faut de l'audace. Le courage est favorisé par Vénus elle-même.
C'est elle qui favorise le jeune homme qui tente un nouveau seuil,
ou l'amie qui, en mettant la clef, lui ouvre la porte.
C'est elle qui apprend descendre furtivement d'un lit voluptueux
et à poser le pied sans bruit;
c'est elle qui montre à échanger, en présence du mari, des gestes qui parlent,
et à cacher des mots caressants sous des signes convenus.
Et ces secrets, elle ne les enseigne pas à tout le monde; mais à ceux que la paresse ne retarde pas
et que la peur n'empêche pas de se lever dans l'obscurité de la nuit.
Ainsi moi quand, parmi les ténèbres, je rôde, anxieux, à travers toute la ville,
Vénus... ne permet point que je rencontre un assassin, qui me blesse d'un coup de poignard, ou un voleur qui s'enrichisse du prix de mes vêtements enlevés.
Celui que l'amour possède peut aller partout sans crainte, il est sacré:
il ne doit pas redouter les injures.
Je ne souffre, moi, ni du froid paralysant d'une nuit d'hiver,
ni de la pluie qui tombe à flots.
Ce sont des peines qui n'ont pas prise sur moi, pourvu que Délie m'ouvre sa porte
et m'appelle sans parler d'un claquement de ses doigts.
Détournez vos regards, vous, homme ou femme, qui vous trouvez sur ma route;
Vénus veut que ses larcins soient cachés.
Ne me faites pas peur par le bruit de vos pas, ne cherchez pas mon nom,
n'approchez pas l'éclatante lumière de votre torche.
Et même si quelqu'un m'aperçoit sans le vouloir, qu'il se taise
et atteste tous les dieux qu'il ne s'en souvient plus.
Car le bavard, quel qu'il soit, sentira que Vénus est née
du sang mêlé aux ondes de la mer en furie.
D'ailleurs ton mari ne l'en croira pas,
ainsi que me l'a promis une sorcière véridique à l'aide de la magie.
Je l'ai vue faire descendre les astres du ciel;
elle détourne par ses enchantements le cours d'un fleuve rapide;
elle entrouvre le sol par son chant, fait sortir les mânes des sépulcres,
tomber les os du bûcher tiède.
Tantôt elle retient d'un sifflement magique les cohortes infernales;
tantôt, d'une aspersion de lait, les fait battre en retraite.
À son gré, elle dissipe les nuées d'un ciel lugubre;
à son gré, elle fait tomber la neige dans un ciel d'été.
Seule, dit-on, elle possède les herbes maléfiques de Médée;
seule, elle dompte les chiens farouches d'Hécate.
Elle a composé pour moi des chants à l'aide desquels tu pourras tromper;
chante-les trois fois, et, les chants débités, crache trois fois;
il ne pourra rien croire de ce qu'on lui dirait de nous,
il n'en croira même pas ses yeux, s'il me voyait lui-même dans ton lit voluptueux.
Mais refuse à d'autres tes faveurs: il verra tout;
je serai le seul avec lequel il ne s'apercevra de rien.
Que croire? Elle m'a dit aussi que
ses chants et ses herbes pouvaient rompre mes amours;
puis, elle m'a purifié à la clarté des torches, et par une nuit sereine
une noire victime est tombée devant les Dieux magiques.
Et moi, je ne demandais pas que mon amour fût détruit tout entier,
mais qu'il fût payé de retour;
car je ne voudrais pas pouvoir me passer de toi.
Il était de fer, celui qui, pouvant te posséder,
a sottement préféré le butin et les armes.
Qu'il chasse devant lui les escadrons vaincus des Ciliciens,
qu'il établisse son camp de guerriers sur un sol conquis,
que, tout couvert d'or et d'argent,
il se fasse voir monté sur un cheval rapide;
moi, pourvu que je fusse avec toi, ma Délie, je me résignerais à atteler mes boeufs moi-même
et à faire paître mon troupeau sur le mont familier;
et pourvu que je pusse te serrer tendrement dans mes bras,
je trouverais doux le sommeil même sur un sol inculte.
À quoi bon coucher sur un lit de pourpre de Tyr, si l'Amour ne nous favorise,
quand la nuit ne ramène que pleurs et insomnies?
Car alors ni les pleurs, ni les couvertures brodées,
ni le murmure d'une eau paisible ne sauraient appeler le sommeil.
Ai-je offensé par mes paroles la divinité de la grande Vénus
et ma langue impie m'en fait-elle maintenant subir la peine?
M'accuse-t-on d'avoir porté un pied sacrilège dans les demeures des dieux
et arraché les guirlandes de leurs foyers sacrés?
Non, si j'étais coupable, je n'hésiterais point à me prosterner dans les temples
et à couvrir de baisers leurs seuils sacrés;
je n'hésiterais point à me traîner à genoux sur la terre en suppliant,
et à frapper ma tête misérable contre la porte sainte.
Mais toi qui ris gaiement de nos malheurs, crains bientôt pour toi:
le Dieu ne sévira point toujours contre moi seul.
J'en ai vu qui, après avoir raillé les malheureuses amours des jeunes gens,
offraient plus tard leurs cous de vieillards aux chaînes de Vénus;
je les ai vus chercher à débiter des propos caressants d'une voix tremblotante,
et à ajuster avec leurs mains des cheveux blancs;
ils n'avaient pas honte de rester plantés devant une porte,
et d'arrêter en plein forum la servante de leur chère amie.
Autour d'un tel homme se pressent en foule serrée garçons et jeunes gens,
et chacun de cracher, pour sa sauvegarde, dans le pli ondoyant de sa robe.
Mais épargne-moi, Vénus; je t'ai toujours servi d'un coeur dévoué.
Pourquoi brûler, cruelle, une moisson qui est tienne?
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Source:
http://remacle.org/bloodwolf/cours/tibulle/elegie5.htm
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