Suite aux controverses sur la réalité du réchauffement climatique et sur celle de la responsabilité de l'homme dans cet éventuel réchauffement par ses émissions de GES, une étude a été commandée par le Ministère de l' Enseignement Supérieur et de la Recherche à l'Académie des Sciences qui fait référence en matière scientifique et qui a délivré ce rapport approuvé à l'unanimité, y compris par M ALLEGRE qui est une des figures de proue du "doute" et des "climatosceptiques"........
Synthétique et très clair. A dévorer.
Il est grand temps d'agir et de réagir véritablement. Pas de mesurettes. Manumanu
INTRODUCTION
Depuis des millénaires, le climat de la Terre varie selon les époques et les lieux. Les
 changements observés s’étalent généralement sur des longues périodes qui atténuent
 la perception que l’homme peut en avoir à un moment donné. Au cours des
 dernières décennies cependant, les changements climatiques semblent s’être
 accélérés. Dans ces conditions, il n’est pas surprenant que le public s’interroge sur la
 réalité de ces changements, leurs causes, leur devenir et, plus encore, leurs
 conséquences immédiates et lointaines sur les modes de vie, la santé, les écosystèmes et l’économie. À ces questions, la Science peut tenter d’apporter des réponses autorisées, même si elles ne sont que partielles ou temporaires, dès lors qu’elles sont guidées par le souci d’objectivité qui doit présider à toute démarche scientifique.
 C’est dans ce contexte que la Ministre de l’Enseignement supérieur et de la
 Recherche s’est tournée vers l’Académie des sciences pour qu’elle organise un débat
 scientifique, afin de faire le point des connaissances actuelles sur ce sujet.
 Le débat, ouvert à quelque 120 scientifiques français ou étrangers, dont des
 spécialistes extérieurs à l’Académie, a été organisé sous forme de contributions
 écrites suivies d’un débat oral qui a eu lieu le 20 septembre 2010. La diversité des
 disciplines représentées – mathématiques, physique, mécanique, sciences de
 l’univers, chimie, biologie et sciences médicales – reflète la complexité du sujet et la
 volonté de l’Académie de placer cette manifestation sous le signe de
 l’interdisciplinarité. Le débat, très riche et de haute tenue scientifique a porté sur les
 méthodes de prévisions climatiques ; il a permis de confronter les différents points
 de vue, de dégager des points de convergence et d’identifier les divergences et
 incertitudes qui persistent. Il est le point de départ d’une réflexion qui sera prolongée
 ultérieurement.
 Malgré les nouveaux outils d’investigations dont on dispose aujourd’hui et malgré le
 volume considérable de données accumulées ces vingt dernières années, il faut
 souligner que la Science ne peut répondre à tout, qu’elle procède par étapes et qu’elle
 ne peut fournir à un moment donné que l’interprétation de faits avérés et des
 prévisions.
1. IMPORTANCE DES OBSERVATIONS POUR L’HISTOIRE RÉCENTE
 L’analyse de l’évolution du climat impose de disposer d’observations globales de
 toutes les composantes du système climatique (atmosphère, océans, terres
 émergées et glaces), sur de longues périodes.
 C’est seulement depuis le milieu des années 1970 que les programmes
 d’observations par satellites, complétés par des systèmes d’observation in situ,
 permettent d’obtenir des ensembles de données climatiques échantillonnées
 régulièrement dans l’espace et le temps. Pour les décennies antérieures, les
 données, plus partielles, font l’objet de retraitements dans le cadre d’une
 coordination internationale pour les rendre homogènes en tenant compte des
 changements d’instrumentation ou d’environnement immédiat.
 La libre mise à disposition des données est une recommandation unanime, même
 si la forme qu’elle doit prendre est débattue. La majorité des chercheurs, en
 climatologie comme dans d’autres disciplines des sciences de l’univers,
 recommande la distribution des données après que les spécialistes les ont
 étalonnées et en ont retiré les effets instrumentaux ou d’environnement. Certains
 demandent aussi la mise à disposition des données brutes.
 De l’ensemble des données, on peut dégager les indicateurs du changement
 climatique, les facteurs de son évolution et les éléments permettant de fonder
 l’étude des climats du passé.
 1.1. LES INDICATEURS DE L’ÉVOLUTION CLIMATIQUE
 1. L’augmentation de la température de surface sur la Terre est de 0,8 ± 0,2
 °C depuis 18701. Elle reste notablement différente pour les deux
 hémisphères : plus forte au Nord et plus forte aux hautes latitudes. Une
 variabilité entre continents est également observée. Enfin, une forte
 modulation sur des périodes annuelles et multidécennales est également
 constatée, avec deux périodes de plus forte augmentation
 (approximativement de 1910 à 1940 et de 1975 à 2000) encadrées par des
 périodes de stagnation ou de décroissance. Les variations climatiques
 naturelles (El Niño, éruptions volcaniques, Oscillation Nord‐Atlantique) y
 sont visibles.
 2. La température des océans, mesurée depuis les années 1950 par les
 bateaux de commerce ou les navires océanographiques (jusque vers 700 m
 de profondeur) et plus récemment par le système de bouées profilantes
 Argo, montre une augmentation moyenne globale depuis quelques
 décennies. Le contenu d’énergie thermique de l’océan a donc aussi
 augmenté, surtout depuis le début des années 1980. Ce réchauffement n’est
 pas uniforme. Il présente une importante variabilité régionale avec
 d’importantes oscillations pluriannuelles, voire décennales.
 3. La réduction de la surface des glaces océaniques arctiques. La banquise,
 dont la fonte ne contribue pas à l’élévation du niveau des océans, est un
 autre indicateur fort de l’accélération de l’évolution du climat : de 8,5
 millions de km2 stable dans la période 1950‐1975, la surface des glaces de
 mer a connu une décroissance très rapide jusqu’à 5,5 millions de km2 en
 2010.
 4. Le recul des glaciers continentaux est observé de façon quasi généralisée
 depuis 3 à 4 décennies, avec une nette augmentation au cours des 20
 dernières années.
 5. Les calottes polaires de l’Antarctique et du Groenland ont un bilan total de
 masse négatif depuis une dizaine d’années. Si quelques régions élevées de
 l’intérieur des calottes, en particulier Antarctique, s’épaississent un peu
 par suite de précipitations neigeuses accrues, la perte de masse domine.
 Celle‐ci s’effectue dans les zones côtières du Groenland et de l’Antarctique
 de l’Ouest par écoulement très rapide de certains glaciers vers l’océan et
 décharge d’icebergs. On pense que le réchauffement des eaux océaniques
 dans ces régions est la cause majeure des instabilités dynamiques
 observées.
 6. Le niveau moyen des océans est un autre indicateur qui intègre les effets
 de plusieurs composantes du système climatique (océan, glaces
 continentales, eaux continentales). Avant 1992, le niveau de la mer était
 mesuré par des marégraphes le long des côtes continentales et de quelques
 îles : le niveau des océans, en moyenne annuelle sur toute la planète, s’est
 élevé à un rythme de 0,7 mm/an entre 1870 et 1930 et d’environ 1,7 mm/an
 après 1930. Depuis 1992, les mesures sont effectuées par satellites : la
 hausse du niveau moyen global de la mer est de l’ordre de 3,4 mm/an. À
 cette élévation moyenne se superposent des oscillations pluriannuelle, liées
 à la variabilité naturelle du système climatique. Depuis le début des années
 1990, les contributions climatiques à cette élévation sont
 approximativement dues, pour un tiers à la dilatation de l’océan
 consécutive au réchauffement et, pour les deux autres tiers, aux glaces
 continentales ‐ à parts quasi égales, fonte des calottes polaires du
 Groenland et de l’Antarctique d’une part, et fonte des glaciers
 continentaux d’autre part.
 7. Les indicateurs biologiques, tels que les déplacements de populations
 animales terrestres ou marines et l’évolution des dates d’activités agricoles
 saisonnières, montrent aussi la survenue d’un réchauffement climatique.
 Bien que difficiles à quantifier, ces éléments sont importants et ont des
 conséquences dans de nombreux domaines d’activités professionnelles où
 ils sont largement pris en compte.
 En résumé, depuis la seconde moitié du XIXe siècle, plusieurs indicateurs
 indépendants montrent sans ambiguïté un réchauffement climatique, post‐Petit
 âge glaciaire2, modulé dans le temps, avec une augmentation de 1975 à 2003.
1‐2. LES FACTEURS D’ÉVOLUTION DU CLIMAT
 On observe l’évolution de certains des facteurs susceptibles d’avoir un effet
 plus ou moins important sur l’équilibre du climat.
 1. L’augmentation des concentrations atmosphériques des gaz à effet de
 serre, autres que la vapeur d’eau qui se recycle rapidement et en
 permanence, est un élément très important, qui doit être observé avec
 précision sur plusieurs décennies pour donner lieu à une interprétation
 fiable.
 Le dioxyde de carbone (CO2) : sa concentration augmente continûment
 depuis le milieu du XIXe siècle, en raison principalement des activités
 industrielles, passant de 280 ppm vers 1870 à 388 ppm en 2009. Le taux de
 croissance mesuré depuis 1970 est environ 500 fois plus élevé que celui
 observé en moyenne sur les 5 000 dernières années. Les études isotopiques
 montrent que l’origine de cette augmentation est due pour plus de la
 moitié à la combustion des combustibles fossiles, le reste aux déboisements
 massifs et pour une faible part à la production de ciment.
 Le méthane (CH4) : dû notamment aux fermentations diverses (zones
 humides, ruminants, déchets domestiques, biomasse, …), aux fuites de gaz
 naturels et à la fonte du pergélisol, sa concentration s’est accrue de 140 %
 sur la même période. Elle semble cependant stabilisée depuis 2000.
 Le protoxyde d’azote (N2O) : dû en grande partie aux activités agricoles
 (dont la biodégradation des nitrates agricoles dans les milieux souterrains
 anoxiques), sa concentration a augmenté de 20 % sur la même période.
 L’augmentation de l’effet de serre induit pour l’ensemble de ces trois
 composants est de 2,3 W/m2.
 2. La radiation du Soleil reçue par la Terre hors de l’atmosphère à une
 latitude donnée en été ou en hiver dépend de la luminosité du Soleil et de
 la distance de la Terre au Soleil, et de l’orientation de l’axe de rotation de la
 Terre. Ces derniers paramètres varient à l’échelle de dizaines de milliers
 d’années en raison de perturbations gravitationnelles exercées par la Lune
 et les autres planètes. Les périodes associées (20 000 ans, 40 000 ans,
 100 000 ans) se retrouvent dans les cycles glaciaires‐interglaciaires du
 Quaternaire et dans les données sédimentaires plus anciennes. Les
 variations de radiation saisonnières ou en latitude qu’elles induisent sont
 importantes, alors que les variations moyennes annuelles calculées sur la
 surface totale de la Terre sont faibles. L’énergie totale rayonnée par le
 Soleil est dominée par la partie visible du spectre et a très peu varié au XXe
 siècle si on fait la moyenne sur les cycles d’activité de 11 ans. La variation
 relative de cette énergie durant ces cycles est de l’ordre du millième. Le
 forçage3 correspondant, de l’ordre de 0,2 W/m2, est 10 fois plus faible que
 celui dû à l’augmentation de l’effet de serre lié aux activités humaines.
 Les cycles d’activité du Soleil4 affectent principalement la partie
 ultraviolette du spectre solaire, mais aussi le vent solaire et les rayons
 cosmiques, qui subissent de fortes variations de leur amplitude pendant le
 cycle solaire ainsi que sur des périodes de plusieurs décennies. L’une de
 ces variations se manifeste par le « Minimum de Maunder » qui a vu,
 pendant plus de 50 ans, une très faible activité solaire révélée par l’absence
 quasi totale de taches solaires (ca 1645‐1715). Cette observation coïncide
 approximativement avec les phases les plus marquées du Petit âge
 glaciaire. Il est intéressant de noter que le minimum solaire récent est le
 plus long depuis 40 ans. L’activité solaire sur cette période montre, pour
 plusieurs indicateurs, une diminution aussi bien des minimas que des
 maximas, le minimum actuel correspondant à une absence de taches
 solaires pendant 266 jours, situation inédite depuis plus de 40 ans.
 L’irradiance mesurée depuis l’espace a diminué de 0,02 % entre l’avantdernier
 et le dernier cycle solaire, tandis que les indicateurs climatiques ont
 montré un réchauffement sur cette période de 40 ans.
 L’activité du Soleil ne peut donc être le facteur dominant de ce
 réchauffement, même si des corrélations entre l’activité solaire et certaines
 variations à court terme de la température terrestre ont été mises en
 évidence, qui pourraient être le signe d’un couplage. Tous les mécanismes
 de transmission et d’amplification du forçage solaire, et en particulier de
 l’activité solaire, ne sont pas encore bien compris. Il faut noter que si le
 cycle de 11 ans de l’activité du Soleil tendait à diminuer d’intensité, comme
 cela a été le cas dans le passé, un ralentissement graduel du réchauffement
 global pourrait se produire.
1‐3. L’ÉTUDE DES CLIMATS DU PASSÉ
 Les climats du passé nous sont accessibles par un ensemble d’indicateurs, qui
 sont :
 ‐ les indicateurs géologiques (géochronologie, paléotempératures,
 sédiments, charbons, fossiles) ;
 ‐ l’observation directe des bulles d’air de l’atmosphère du passé piégées
 dans les carottes de glace extraites des calottes du Groenland et de
 l’Antarctique ainsi que leur analyse chimique très précise, indicateurs qui
 couvrent 800 000 ans en Antarctique et 123 000 ans au Groenland ;
 ‐ l’observation de traceurs isotopiques indicateurs de la température ;
 ‐ l’observation, l’analyse statistique, la géochimie isotopique sur les
 sédiments et sur les microfaunes marines.
 C’est ainsi qu’on admet, par exemple, autour de 700 millions d’années, une
 Terre largement recouverte de glace, ou encore l’existence d’un
 refroidissement général mais non linéaire depuis 60 millions d’années, avec
 l’apparition de la calotte glaciaire antarctique il y a 35 millions d’années, et
 celles de l’hémisphère Nord, il y a environ 4 millions d’années. L’actuelle
 évolution climatique se place par rapport au réchauffement climatique naturel
 postérieur à la dernière glaciation.
 Les observations dans les carottages de glaces donnent des indications
 précieuses sur la température et le contenu de l’atmosphère en CO2 et autres
 gaz à effet de serre (CH4) qu’on peut combiner avec des analyses géologiques
 de sédiments marins sur l’extension des calottes glaciaires au cours des cycles
 glaciations/déglaciations du Quaternaire. Ces observations peuvent aider à la
 modélisation des mécanismes du climat et à la définition de tests qui peuvent
 être utilisés pour la validation des modèles climatiques. Les changements
 associés aux déglaciations montrent des effets complexes : un réchauffement
 dans l’Antarctique précède de 800 ans une augmentation du CO2 ; celle‐ci est
 elle‐même suivie, 4 000 ans plus tard, d’une réduction des calottes glaciaires
 dans l’hémisphère Nord, susceptible de réduire l’albédo5 et de provoquer
 ainsi une amplification du réchauffement. Ces transitions complexes
 constituent autant de situations observées permettant de tester les modèles.
 Les analyses de la glace des calottes polaires montrent que les concentrations
 en CO2, CH4 et N2O n’ont vraisemblablement jamais été aussi élevées depuis
 800 000 ans6.
 2‐ LES MÉCANISMES CLIMATIQUES
 Le Soleil, par l’énergie que la Terre en reçoit, est le moteur principal de la
 machine climatique. L’énergie rayonnée par le Soleil fait l’objet d’observations
 dont la précision s’est accrue avec les données fournies par les satellites.
 Une partie de l’énergie solaire (principalement contenue dans la partie visible du
 spectre électromagnétique) est directement renvoyée vers l’espace par les nuages
 et la surface terrestre (albédo) ; l’autre partie est absorbée par le sol et les océans.
 En situation d’équilibre, ces derniers rayonnent toute cette énergie dans
 l’infrarouge en direction de l’espace. Mais l’atmosphère7, à son tour, absorbe une
 partie de ce rayonnement terrestre et le réémet à la fois vers l’espace et vers le sol.
 La surface de la Terre est donc plus chaude qu’elle ne le serait sans atmosphère :
 c’est ce qui est connu sous le nom d’effet de serre.
 Les molécules responsables de cet effet sont la vapeur d’eau, le gaz carbonique et
 d’autres gaz comme le méthane et le protoxyde d’azote.
 Quand les conditions changent — que ce soit par l’énergie reçue du Soleil ou par
 le contenu en gaz à effet de serre — le système climatique évolue vers un nouvel
 état d’équilibre. C’est ce que les climatologues désignent sous le vocable de
 réponse à un forçage. Dans cette évolution, le changement d’un paramètre
 entraîne des modifications d’autres paramètres : par exemple, l’élévation de
 température augmente le contenu en vapeur d’eau et en gaz carbonique de
 l’atmosphère, modifie la couverture nuageuse, diminue le volume des glaces
 continentales, etc. L’augmentation de température de l’océan risque de diminuer
 l’efficacité de celui‐ci pour absorber une partie du carbone anthropique. Ces
 rétroactions peuvent être positives, renforçant l’effet du forçage initial, ou
 négatives quand elles le réduisent. Selon les paramètres qui entrent en jeu, ces
 effets, qui peuvent être quantitativement importants, se manifestent sur des
 périodes courtes, de quelques jours pour l’évolution de l’atmosphère ou, au
 contraire, très longues pour l’océan.
 Les effets potentiels de l’activité du cycle solaire sur le climat sont l’objet de
 controverses mais donnent lieu à des recherches actives. Certains mécanismes
 invoqués concernent l’effet du rayonnement cosmique galactique, fortement
 modulé par le vent solaire qui pourrait affecter la formation des nuages ; des
 couplages supplémentaires entre la stratosphère et la troposphère associés à des
 courants électriques sont également évoqués. Ces effets, secondaires par rapport à
 lʹeffet des conditions atmosphériques telles que la teneur en vapeur dʹeau, la
 stabilité et la circulation générale de lʹatmosphère, etc., dépendent d’une physique
 sous‐jacente qui fait actuellement l’objet d’études expérimentales au CERN.
 D’autres mécanismes, qui mettent en jeu l’évolution importante de la composante
 UV au cours du cycle et qui modifient la distribution dʹozone stratosphérique,
 sont actuellement à lʹétude.
 L’océan est un élément essentiel du système climatique, en raison de sa
 dynamique et de son inertie thermique qui lui confèrent une évolution beaucoup
 plus lente que celle de l’atmosphère. Il joue ainsi un rôle de régulateur à long
 terme du système, retardant de plusieurs siècles, voire millénaires, le retour à
 l’équilibre après des perturbations climatiques majeures. Des couplages de
 l’océan avec l’atmosphère, encore insuffisamment connus, naissent les grandes
 perturbations climatiques naturelles, comme El Niño ou l’Oscillation Nord‐
 Atlantique, qui se manifestent sur des échelles de temps de quelques années à
 quelques décennies.
 Les calottes glaciaires et les climats du Quaternaire sont connus à partir des
 analyses des carottages de glace. Ils ont montré, à la fois une oscillation entre
 périodes glaciaires et interglaciaires, et une stabilité globale pendant les derniers
 millénaires, indiquant l’existence d’au moins une rétroaction négative efficace, en
 premier lieu l’émission de rayonnement infrarouge terrestre. Les basculements
 entre périodes glaciaires et interglaciaires semblent, eux, affectés par des
 rétroactions positives fortes entre température, contenu en CO2 et surfaces des
 calottes glaciaires de l’hémisphère Nord pour les variations les plus rapides.
 Les gaz à effet de serre
 L’effet direct d’un changement de concentration du CO2 sur l’atmosphère est bien
 compris. Il se traduit par une augmentation du rayonnement infrarouge émis par
 le sol, évaluée à 3,7 ± 0,1 W/m2 pour un doublement du CO2 atmosphérique,
 correspondant à un réchauffement moyen en surface évalué à 1,1 ± 0,2 °C.
 Environ la moitié du CO2 produit par les activités humaines à un moment donné
 et rejeté dans l’atmosphère, y subsiste. L’autre moitié est actuellement absorbée
 par l’océan8 et la végétation continentale : il faut environ un siècle pour que la
 fraction transmise à l’atmosphère soit diminuée de moitié. La connaissance des
 mécanismes d’échanges océan‐atmosphère et continent‐atmosphère a fait de
 grands progrès mais reste encore incertaine pour des prédictions plus précises à
 l’échelle du siècle. Cette connaissance dépend de la description de la circulation
 océanique profonde et de la complexité de la photosynthèse.
 Les incertitudes sur l’effet global indirect d’un changement de concentration du
 CO2, avec toutes les rétroactions prises en compte, font l’objet de débats au sein
 de la communauté des climatologues. La complexité des rétroactions a conduit la
 majorité des scientifiques à conclure que les modèles sont indispensables pour
 évaluer correctement cet effet indirect.
 3. LES MODÈLES CLIMATIQUES
 Les modèles climatiques se sont perfectionnés depuis 30 ans, prenant en compte
 de nombreux mécanismes ignorés dans les premiers modèles. Cependant,
 l’évaluation des incertitudes est au centre des débats.
 3‐1. DEUX TYPES DE DESCRIPTIONS DES PROCESSUS
 La modélisation des processus doit tenir compte de deux types de
 mécanismes : tout d’abord ceux pour lesquels les processus physicochimiques
 sont bien compris et peuvent être traduits en équations, et les autres, trop
 complexes, qui ne peuvent être actuellement décrits que par des relations
 phénoménologiques fondées sur des observations.
 Dans le premier groupe figurent :
 ‐ la circulation tridimensionnelle de l’atmosphère et son évolution ;
 ‐ le forçage radiatif, qui fait l’objet d’une modélisation physique du transfert
 de rayonnement au travers de l’atmosphère gazeuse, prenant en compte sa
 composition chimique, la stratification de la température et la présence
 d’aérosols ;
 ‐ l’hydrodynamique des modèles de circulation océanique.
 Pour ces mécanismes, les limitations des résolutions spatiale et temporelle des
 modélisations sont liées à la puissance des ordinateurs et aux performances
 des algorithmes utilisés.
 Le second groupe de processus demande une part de modélisation
 empirique.
 Les rétroactions à un forçage, qui émergent des modèles, dépendent de
 processus des deux types.
 La rétroaction radiative de la vapeur d’eau à une élévation de température de
 1,1 ± 0,2 °C produite par un doublement du CO2, conduit, dans toutes les
 modélisations, à augmenter l’effet direct de 0,5 à 1 °C. Les recherches
 continuent sur d’éventuels effets complémentaires induits.
 L’effet des nuages — gouttelettes d’eau liquide ou particules de glace — peut
 varier de manière importante selon les modélisations : la description de
 l’évolution de la nébulosité reste unanimement reconnue comme la partie la
 plus incertaine. Les nuages exercent deux effets antagonistes : un effet
 « parasol » renvoyant le flux solaire vers l’espace (rétroaction négative par les
 nuages bas) et un effet de serre (rétroaction positive par les nuages hauts). Les
 modèles les moins « sensibles » prédisent un effet global des nuages
 approximativement neutre, alors que les modèles plus « sensibles »
 conduisent à un réchauffement supplémentaire de l’ordre de 2 °C, pour un
 doublement de la concentration en CO2.
 Les modèles climatiques actuels ont une résolution spatiale de plusieurs
 dizaines, voire centaines de kilomètres, qui ne permet pas de décrire les
 nuages individuellement mais seulement statistiquement, au travers de
 modèles empiriques.
 La distribution géographique du contenu en vapeur d’eau donnée par les
 modèles les plus récents est très semblable à celle qui est observée, ce qui
 conforte la modélisation.
 Les variations multidécennales de l’océan (Oscillations Nord‐Atlantique, El
 Niño, …) sont encore difficiles à modéliser.
 La fonte des glaces sous l’effet d’un réchauffement est un mécanisme agissant
 à long terme. Les effets de la dynamique des calottes polaires commencent à
 être pris en compte dans des modèles climatiques couplés.
 Les effets de la végétation ou de la biologie marine, qui affectent directement
 l’albédo des surfaces continentales ou marines, ne peuvent être modélisés à
 partir de processus biologiques fondamentaux. L’albédo est décrit par des
 relations empiriques, déduites d’une combinaison d’observations satellitaires
 et au sol.
 3‐2. TESTS DE VALIDATION
 La démarche actuelle de validation des modèles climatiques est de travailler
 avec une hiérarchie de tests. Le modèle est développé à partir d’études de
 processus, telles que les campagnes d’observation d’un type de nuage ou de
 végétation. Une fois sa formulation définie, on le fait fonctionner en « mode
 météo » (court terme) ou en simulation des instabilités naturelles
 pluriannuelles, ou encore par référence au cycle saisonnier ou aux climats
 anciens. Les comparaisons avec les données d’observation sont faites sur un
 grand nombre de paramètres. Elles constituent la seule façon de tester ces
 modélisations et de comparer à la réalité l’amplitude des rétroactions révélées
 par les modèles.
 La capacité des modèles climatiques à reproduire les évolutions passées du
 climat à l’échelle pluridécennale est limitée par le fait que des données
 homogènes ne sont apparues que dans les années 1970.
 Des résultats très significatifs ont été obtenus : réchauffement plus fort à la
 surface des continents quʹà la surface des océans, et plus fort encore dans les
 régions arctiques, diminution des extrêmes de froid, augmentation de la
 fréquence des événements extrêmes chauds, diminution globale de la
 cryosphère9, réchauffement de lʹatmosphère tropicale plus fort en altitude quʹà
 la surface, variabilité naturelle à lʹéchelle décennale des tendances globales au
 réchauffement au cours du XXe siècle, décroissance de la surface des glaces de
 mer arctiques à partir de 1975‐80.
 La validité des projections pour les décennies à venir et leurs incertitudes
 sont une question centrale. La comparaison des résultats de ces projections
 fournit une indication sur les incertitudes dues aux différences de
 modélisation de certains mécanismes. De plus, les mécanismes non encore
 identifiés ne sont naturellement pas inclus dans les modèles.
 Les corrélations directes purement statistiques entre deux quantités sont utiles
 pour mettre en évidence des couplages non modélisés ou mal représentés,
 mais non pour tester précisément les mécanismes internes aux modèles et
 leur pertinence quant à la simulation des variations du climat. C’est une partie
 des débats actuels entre scientifiques.
 Les éventuels comportements fortement instables ou chaotiques du système
 atmosphère‐océan‐cryosphère‐surfaces continentales sont un autre facteur
 important d’incertitude.
 La nature des comportements chaotiques ou de bifurcations entre états bien
 distincts du système climatique demeure ouverte et fait l’objet d’un intense
 effort de recherche au niveau international.
CONCLUSIONS
 • Plusieurs indicateurs indépendants montrent une augmentation du
 réchauffement climatique de 1975 à 2003.
 • Cette augmentation est principalement due à l’augmentation de la
 concentration du CO2 dans l’atmosphère.
 • L’augmentation de CO2 et, à un moindre degré, des autres gaz à effet de serre,est incontestablement due à l’activité humaine.
 • Elle constitue une menace pour le climat et, de surcroît, pour les océans en raison du processus d’acidification qu’elle provoque.
 • Cette augmentation entraîne des rétroactions du système climatique global,dont la complexité implique le recours aux modèles et aux tests permettant de les valider.
 • Les mécanismes pouvant jouer un rôle dans la transmission et l’amplification du forçage solaire et, en particulier, de l’activité solaire ne sont pas encore bien compris. L’activité solaire, qui a légèrement décru en moyenne depuis 1975, ne peut être dominante dans le réchauffement observé sur cette période.
 • Des incertitudes importantes demeurent sur la modélisation des nuages, l’évolution des glaces marines et des calottes polaires, le couplage océanatmosphère, l’évolution de la biosphère et la dynamique du cycle du carbone.
 • Les projections de l’évolution climatique sur 30 à 50 ans sont peu affectées par les incertitudes sur la modélisation des processus à évolution lente. Ces projections sont particulièrement utiles pour répondre aux préoccupations sociétales actuelles, aggravées par l’accroissement prévisible des populations.
 • L’évolution du climat ne peut être analysée que par de longues séries de données, à grande échelle, homogènes et continues. Les grands programmes d’observations internationaux, terrestres et spatiaux, doivent être maintenus et développés, et leurs résultats mis à la libre disposition de la communauté scientifique internationale.
 • Le caractère interdisciplinaire des problèmes rencontrés impose d’impliquer davantage encore les diverses communautés scientifiques pour poursuivre les avancées déjà réalisées dans le domaine de la climatologie et pour ouvrir de nouvelles pistes aux recherches futures.











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