Chapitres
La juridiction est le cadre dans lequel s’inscrit le procès civil.
Dans les lexiques, le mot juridiction a deux sens : celui de la mission de juge et/ou organe qui est chargé de juger.
La théorie de la juridiction a un aspect fondamental ce qui transparait au travers du droit fondamental à un tribunal.
Le droit fondamental à un tribunal est le droit de porter le litige devant un organe ayant une fonction juridictionnelle.
Cette théorie implique le principe d’égalité devant la justice qui se décompose en deux parties avec le droit à la même justice et le droit égal à la justice avec la gratuité de celle-ci et l’aide juridictionnelle.
L’activité de la juridiction
De façon traditionnelle, la mission d’une juridiction est de dire le droit (mission gracieuse) est de trancher les litiges (mission contentieuse).
La qualification d’acte juridictionnel
Selon le vocabulaire juridique, l’acte juridictionnel est l’acte par lequel une juridiction tranche une contestation au terme d’une procédure organisée et qui pour toutes ces raisons est revêtu de l’autorité de la chose jugée; acte parfois caractérisé par un seul des critères ci-dessus associés.
Paragraphe 1 - La diversité des critères de qualification.
A - Les critères formels
S’attacher au critère formel c’est tenir compte de signes extérieurs à l’acte : soit on s’intéresse à l’auteur de l’acte soit à la procédure suivie.
Carré de Malberg indique qu’il faut vérifier si l’acte a été élaboré par des organes spécialisés, hiérarchisés, indépendants et autonomes selon des règles procédurales assurant des garanties au plaideur.
Ce double critère pose le problème qu’il ne permet pas de distinguer, au sein des actes élaborés par la juridiction, les actes juridictionnels et les actes non juridictionnels.
Gaston Jèze a recherché un autre critère : pour lui, le critère est l’autorité de la chose jugée.

En cours droit du travail, en effet, un acte est juridictionnel dès lors qu’il est revêtu de la chose jugée.
Cependant, ce critère pose problème car il confond la cause et l’effet. Il faut donc se tourner vers les critères matériels.
B - Les critères matériels.
Ici, l’on s’intéresse à des données internes de l’acte. Quatre critères ont été avancés :
- Critère de la contestation : un acte est juridictionnel s’il porte sur une contestation, c’est-à-dire sur une opposition d’intérêts et de prétentions révélées par le procès. Ce critère n’est pas valable pour le recours pour excès de pouvoir ainsi que pour le pourvoi en cassation formé par le ministère public dans l’intérêt de la loi.
- Critère de la structure de l’acte juridictionnel : l’acte juridictionnel serait composé de 3 éléments : une prétention, c’est-à-dire une question de droit posée au juge pour qu’il la résolve ; une constatation, c’est-à-dire la solution fournie par le juge à la question posée ; une décision, c’est-à-dire la conséquence de la constatation qui permet sa réalisation concrète. Ce critère ne peut fonctionner car la prétention est un élément extérieur. De plus, certains actes juridictionnels sont dépourvus de décision (exemple de la question préjudicielle).
- Critère de la finalité de l’acte juridictionnel : un acte est juridictionnel à chaque fois qu’il traduit l’activité de vérification du juge, c’est-à-dire le fait que le juge constate la violation d’une règle de droit.
- Critère de la qualité de tiers du juge : l’acte est juridictionnel parce que le juge intervient en qualité de tiers ; il est étranger aux intérêts mises en cause.
Si on fait le ‘‘mélange’’ de ces critères, celui que nous allons retenir est le fait de dire qu’est juridictionnel l’acte du juge qui statue par application des règles de droit peu importe que le litige existe ou non.
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La diversité des actes juridictionnels
A - Les actes contentieux
Ce sont tous les actes qui tranchent une contestation.
Le terme contentieux renvoi à l’existence d’un litige déjà né. On y classe tous les jugements rendus sur le fond qu’ils soient rendus contradictoirement ou par défaut.
Cela concerne aussi les jugements qui tranchent tous les litiges ou simplement une partie du litige et surtout que ces jugements soient définitifs ou provisoires.
Cela concerne les jugements d’expédient qui sont des décisions prises en forme de jugement par lesquelles le juge entérine l’accord des parties en lui conférant l’autorité de la chose jugée.
Il ne faut pas confondre ces derniers avec les jugements de donné acte qui sont des jugements faisant état à la demande d’une partie d’une constatation ou d’une déclaration.
Dans le jugement d’expédient, l’accord des parties est dissimulé aux tiers ; l’acte est donc juridictionnel. Au contraire, dans le jugement de donné acte, l’accord des parties est révélé aux tiers ; cet acte reste conventionnel.
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B - Les actes gracieux
Ce sont les jugements qui interviennent en l’absence de litige lorsque le juge est saisi d’une demande dont la loi exige qu’elle soit soumise à son contrôle.
Le terme gracieux renvoi à l’absence de litige déjà né.
On trouve des actes gracieux lorsque le juge est saisi pour parfaire un acte juridique (exemple du changement de régime matrimonial) mais aussi lorsque le juge a pour mission de constater un fait juridique (exemple des rectifications d’acte d’état civil).
Pendant très longtemps, ces actes gracieux n’étaient pas considérés comme des actes juridictionnels puisque l’on considérait que le critère était l’existence d’un litige. Or, le critère aujourd’hui retenu est celui que le juge dit le droit ce qui est le cas pour les actes gracieux.
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C - Les ordonnances sur requête
Selon le code, l’ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler son adversaire.
La caractéristique essentielle est son absence de caractère contradictoire.
Premièrement, on disait que l’ordonnance sur requête était rattachée à la matière gracieuse car on estimait que l’ordonnance est introduite par une requête comme en matière gracieuse. On estimait également que puisque le requérant a le droit de ne pas appeler son adversaire, il n’y a pas de litige comme en matière gracieuse.
A l’heure actuelle, on estime que cette ordonnance doit être rattachée à la matière contentieuse car l’absence d’adversaire ne signifie pas l’absence de litige mais également parce que la procédure gracieuse ne peut être mise en oeuvre que dans les cas prévus par la loi.
Or, l’ordonnance sur requête peut être utilisé en dehors des cas prévus par la loi.
Le dernier argument en faveur de la matière contentieuse est que la matière gracieuse aboutit à une décision définitive alors que l'ordonnance sur requête est une décision provisoire.
La conclusion de cette évolution est que l’ordonnance sur requête n’a pas de qualification propre. Autrement dit, elle est gracieuse s’il n’y a pas de litige et elle est contentieuse s’il y a un litige.
Les attributs de l’acte juridictionnel

Il y a les effets substantiels ; la décision du juge modifie la situation des parties.
Il y a les effets procéduraux qui sont les effets inhérents à la procédure
Les qualités de l’acte juridictionnel sont la force exécutoire, l'hypothèque légal en cas de condamnation, l’autorité de la chose jugée et le dessaisissement du juge.
L’autorité de la chose jugée
L’autorité de la chose jugée est la qualité attribuée par la loi à tout jugement définitif relativement à la contestation qu’il tranche et qui empêche, sous réserve des voies de recours, que la même chose soit rejugée entre les mêmes parties.
L’autorité de la chose jugée est prévue par le code civil aux articles 1350 et 1351.
A - Le domaine de l’autorité de la chose jugée
Tous les actes juridictionnels contentieux comme gracieux bénéficient, en principe, de l’autorité de la chose jugée.
Il faut cependant préciser que ont autorité de la chose jugée les jugements sur le fond et les jugements statuant sur une exception de procédure ou sur une fin de non-recevoir.
Au contraire, n’ont pas autorité de la chose jugée tous les jugements provisoires tels les référés et les jugements avant dire droit.
En principe, l’autorité de la chose jugée est limitée au dispositif (casse ou rejette) du jugement ce qui s’explique par le fait que c’est dans le dispositif que le juge tranche la contestation.
Autrement dit, les motifs n’ont jamais autorité de la chose jugée.
L’autorité de la chose jugée peut s’étendre au dispositif implicite, c’est-à-dire ce que le juge n’a pas réglé expressément mais qu’il a du nécessairement résoudre pour aboutir à sa décision finale.
B - La portée de l’autorité de la chose jugée
- En ce qui concerne les parties, l’autorité de la chose jugée emporte immutabilité de la chose jugée, c’est-à-dire ce qui a été jugé ne pourra plus jamais être remis en cause sauf exercice d’un recours. En matière civile, on dira que le jugement acquiert force de vérité légale. Cela signifie que toute nouvelle demande identique à une précédente demande déjà jugée est irrecevable. Cette fin de non-recevoir fonctionne à une triple condition : il faut une identité de partie, une identité d’objet et une identité de cause.
Pour autant cette fin de non recevoir ne fonctionne qu’à une triple condition :
- Pour que le mécanisme fonctionne il faut une identité de partie. Cela signifie que le demandeur, le défendeur, et les intervenants (tiers qui deviennent des parties) sont les mêmes que dans la première instance et ils agissent avec la même qualité. Qualité est au sens technique du terme : la qualité pour agir au sens de titre pour agir.
- Seconde identité : l’identité d’objet : Il ya identité d’objet lorsque le demandeur réclame le même droit sur une demande matériellement identique.
- Enfin, l’identité de cause : il y a identité de cause lorsque le demandeur se fonde sur les mêmes faits et sur les mêmes qualifications juridiques. Dans cette vision classique la cause sont les faits qualifiés.
Cette vision aujourd’hui ne fonctionne plus : Arrêt Assemblée plénière Cour de Cassation prononcé le 7 Juillet 2006 : dans cet arrêt la Cour a créée le principe de concentration des moyens.
Il signifie que le justiciable doit dès la première instance présenter l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à fonder sa demande.
Arrêt rendu par la première chambre civile, le 1er Juillet 2010 : un couple qui s’était porté caution d’un prêt bancaire, la banque lui demande remboursement.
Le couple conteste la validité du cautionnement. Ils perdent le procès. Plus tars ils font un second procès et veulent agir en procès civil. La CC dit que leur demande est irrecevable car ils auraient du faire cette demande au cours du premier procès. Ainsi on empêche un second procès.
Cet exemple est intéressant car quelques mois plus tard le seconde chambre civile prononce un arrêt, daté du 23 Septembre 2010 : cette fois la CC juge que l’action en responsabilité intentée contre la banque n’avait pas le même objet que l’action en paiement exercée par celle-ci.
Ainsi aujourd’hui la cause ce ne sont plus les faits qualifiés mais ce sont les faits. Car dans ces arrêts on voit que le changement de fondement juridique ne vaut pas changement de cause. Qu’on agisse en responsabilité ou en nullité on estime que la cause est la même.
A l’égard des parties l’autorité de la chose jugée est d’empêcher qu’un même procès soit reproduit.
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La portée à l’égard des tiers
Pour les tiers, l’autorité de la chose jugée ne peut ni leur nuire ni leur profiter. C’est ce que l’on appelle le principe de la relativité de la chose jugée.
Les tiers dont on parle ici sont les tiers purs, c'est-à-dire qui n’ont aucun rapport avec l’instance, qui n’ont pas fait d’intervention.
Ensuite, si le jugement porte atteinte aux intérêts d’un tiers celui-ci peut agir en tierce opposition pour faire rétracter ce qui a été jugé à son égard.
Autre remarque, si la chose jugée est relative, elle n’en est pas moins opposable. Opposable signifie que le jugement a modifié l’ordonnancement juridique et tout le monde doit respecter ce nouvel ordonnancement.
Le domaine de l’autorité de la chose jugée (A l’oral)
Le dessaisissement du juge
D’abord le dessaisissement on peut le définir comme la perte du pouvoir de juger une affaire dont une juridiction était saisie.
Le principe
Le principe est posé par l’article 481 du Code de procédure civile, qui précise « le jugement dès son prononcé dessaisit le juge de la contestation qu’il tranche. Dès que le juge s’est prononcé il épuise son pouvoir.
Cela signifie que le juge n’a pas le droit de revenir sur sa décision même si les parties sont d’accord et même su renvoi du juge d’appel.
Autre conséquence : le juge ne peut pas modifier les termes de sa décision ni se rétracter. Enfin, le juge ne peut pas se réserver le droit de réexaminer l’affaire.
Ce dessaisissement ne concerne pas tous les jugements : par exemple il ne concerne pas les jugements avant dire droit, ni les ordonnances sur requête, tout simplement car ces décisions de justice sont provisoires donc logiquement le juge peut revenir dessus.
Une jurisprudence a relevée, selon un arrêt de la 1ère Chambre Civile, Arrêt du 6 Avril 1994 : l’article 481 n’est pas applicable aux décisions rendues en matière gracieuse, lesquelles n’ayant pas autorité de la chose jugée restent susceptibles d’être rapportées ou modifiées si les circonstances dans lesquelles elles ont été prononcées viennent à changer. Cet arrêt est très critiquable car la première chambre civile estime que les actes gracieux n’ont pas autorité de la chose jugée, alors que maintenant on estime que ces actes gracieux ont autorité de la chose jugée. Exemple : le divorce par consentement mutuel se fait par acte gracieux : et même si c’est gracieux le juge ne peut pas revenir dessus. Autorité de la chose jugéeà jugement définitif.
Les exceptions
- Les fausses exceptions
Il existe de fausses exceptions car le juge ne revient pas sur sa décision en dehors d’une instance nouvelle.
Il y a trois fausses exceptions :
- Le recours en interprétation : les parties demandent au juge d’interpréter sa propre décision en cas d’obscurité ou de désaccord sur son sens à condition que cette décision ne soit pas frappée d’appel.
- Le recours en rectification d’omission et d’erreur matérielle : ici les parties demandent au juge de rectifier son jugement car il est entaché d’une erreur matérielle ou parce qu’une mention fait défaut. C’est d’abord le cas lorsqu’il y a des erreurs de calculs, ou encore des erreurs d’orthographe. Ou encore rectifier le fait qu’il y ait une distorsion entre le motif et le dispositif.
- Le recours en rétractation : ici le juge modifie sa décision à la suite d’une opposition, d’une tierce opposition ou d’un recours en révision (faits nouveaux qui apparaissent). Les parties font un recours et ces voies de recours ont la particularité d’être portées devant le même juge.
- La véritable exception
La véritable exception concerne les hypothèses où les parties demandent au juge de modifier sa décision.
Cette modification peut intervenir dans deux sens :
- D’abord les parties peuvent demander au juge d’augmenter sa décision : dans l’hypothèse où le juge a statué INFRA PETITA., ce qui veut dire en dessous de ce qui a été demandé.
- Le juge peut également être saisi pour diminuer sa décision : soit lorsque le juge s’est prononcé EXTRA PETITA ou ULTRA PETITA. Extra PETITA signifie que le juge a statué sue des choses qui ne lui ont pas été demandées. ULTRA PETITA c’est lorsqu’il accord plus que ce qu’on lui a demandé.
C’est l’application du principe dispositif.
Véritable exception car le juge est de nouveau saisi de l’affaire sans qu’une nouvelle instance ne commence.
Il y a vraiment exception au dessaisissement.
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J aimerais suivre les cours avec vous car c est très interessant
Bonjour, nous serions ravis de vous aider ! Rendez-vous sur la plateforme de Superprof, sélectionnez la rubrique « Découvrir nos Superprofs » en indiquant la matière souhaitée. Vous trouverez de nombreux professeurs près de chez vous. Bonne journée ! 🙂
Moi j’aimerais savoir s’il y a véritablement une différence entre un acte juridictionnel et un acte judiciaire.
Bonjour,
Comme nous l’expliquons dans le cours, un acte juridictionnel est un acte accompli dans le cadre d’une procédure judiciaire, (ce qui est toute la différence) destiné à produire certains effets de droit et qui a ainsi le plus souvent un caractère déclaratif. En effet, un acte est juridictionnel dès lors qu’il est revêtu de la chose jugée.
Bonne journée !
Comment analyser un jugement de TGI prononcé « au nom de la république française » en faveur d’une administration et non pas « rendu au nom du peuple français »?